LA DOULEUR DE L’ÉPAULE EN DEHORS D’UN TRAUMATISME AIGU

  1. RAPPEL ANATOMIQUE
  2. EXAMEN CLINIQUE
    1. INTERROGATOIRE – LES PLAINTES ALLÉGUÉES
    2. EXAMEN PHYSIQUE OBJECTIF
    3. MANOEUVRES DE TESTING DE LA COIFFE DES ROTATEURS
  3. LES EXPLORATIONS PARACLINIQUES
  4. NOSOGRAPHIE: LES DIFFERENTES LESIONS
  5. DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS
  6. TRAITEMENT
    1. ARSENAL THÉRAPEUTIQUE : LES MOYENS DISPONIBLES
    2. INDICATIONS

Hormis les situations d’accidents aigus (de la voie publique, domestiques, de travail, sportifs…), les douleurs d’épaule, aiguës ou chroniques, sont courantes en consultation d’orthopédie et de rhumatologie.

RAPPEL ANATOMIQUE

L’épaule humaine comporte un groupe de cinq articulations de différents types qui participent à la mobilité de la racine du membre supérieur qu’on appelle la ceinture scapulaire.

Il s’agit de l’articulation gléno-humérale (omoplate – humérus) qui est une articulation de description typique avec tous les éléments caractéristiques de ce type de structure anatomique ; c’est l’articulation la plus mobile du corps humain. Ensuite il y a l’articulation sous-acromio-deltoïdienne pouvant être le siège de conflit entre le sommet de la tête humérale et la voûte acromiale, l’articulation scapulo-thoracique, l’articulation sterno-claviculaire et l’articulation acromio-claviculaire. Cette dernière a la particularité d’être l’une des trois articulations de l’organisme à avoir un ménisque (fibrocartilage) comme le genou et l’articulation temporo-mandibulaire.

Nous passons les détails de la fonction pour signaler simplement que les mouvements d’abduction (élévation latérale du bras) et de flexion (élévation antérieure du bras) débutent dans l’articulation gléno-humérale puis recrutent progressivement la sous-acromio-deltoïdienne puis la scapulo-thoracique dans la deuxième moitié des 180° normaux et que les mouvements d’anté et de rétro-pulsion de l’épaule font essentiellement appel à la sterno-claviculaire.

EXAMEN CLINIQUE

    1. INTERROGATOIRE – LES PLAINTES ALLÉGUÉES

Quel que soit le siège de sa douleur, le patient consulte en disant « J’ai mal à l’épaule ». La précision de la zone la plus douloureuse ou de laquelle est partie la douleur initialement est capitale. Il faut en spécifier le caractère aigu ou chronique avec une éventuelle accentuation aiguë. Le rythme mécanique (de jour à l’effort uniquement) ou inflammatoire (souvent même de nuit) voire mixte sera noté. En rechercher des irradiations et le retentissement dans la vie courante.

Les antécédents seront recherchés :

Une notion ancienne de traumatisme : fractures de la tête de l’humérus pouvant évoluer vers une arthrose gléno-humérale (omarthrose) secondaire, les disjonctions acromio-claviculaire ou sterno-claviculaire sources d’arthroses secondaires également.

Noter les conditions de travail car certaines professions exposent à des tendinites de la coiffe des rotateurs qui sont reconnues sur le plan administratif comme une Maladie Professionnelle dans le cadre du nouveau concept de TMS (Troubles Musculo-Squelettiques).

Penser aux rhumatismes inflammatoires ou micro cristallines (goutte, calcifications) ou séniles (pseudo poly arthrite rhizomélique : PPR et la maladie de Horton…).

Des antécédents cardiaques surtout si la douleur est à gauche.

Un antécédent d’arthrite septique de la gléno-humérale, parfois dans l’enfance.

Ne pas oublier chez certaines populations une notion personnelle ou familiale de drépanocytose pouvant occasionner une mort osseuse (ostéonécrose aseptique de la tête humérale).

    1. EXAMEN PHYSIQUE OBJECTIF

L’inspection notera l’existence ou non d’amyotrophie autour de l’épaule. La palpation douce et minutieuse confirmera la zone exacte de la souffrance. La mobilisation patiente évaluera les limitations d’amplitude articulaire dans des différents secteurs et compartiments de l’épaule. Rechercher un éventuel épanchement ou une déformation, un déficit sensitivomoteur de tout le membre supérieur. Ne pas oublier d’examiner le rachis cervical.

    1. MANŒUVRES DE TESTING DE LA COIFFE DES ROTATEURS

Les éponymes des manœuvres (Jobb, Neer, Yocum, Patte, …) importent peu mais le but est la mise en stress des différents composants musculo-tendineux de la coiffe des rotateurs de l’épaule (les sus et sous épineux, le sous scapulaire et le tendon de la longue portion du biceps brachial).

  1. LES EXPLORATIONS PARACLINIQUES
    1. La radiographie standard de l’épaule de face dans les trois rotations et un profil de Lamy par exemple peut apporter beaucoup de renseignements : un bec acromial source de conflit, une densification du sommet du tubercule majeur (trochiter) sur la tête humérale dans le cadre d’un conflit sous acromial, une excentration de la gléno-humérale, des signes d’arthrose, d’ostéonécrose. Les calcifications de la bourse séreuse sous acromio-deltoïdienne signe d’une tendinite calcifiante.
    2. L’échographie peut être contributive notamment pour les lésions de la coiffe mais est opérateur dépendante.
    3. L’arthroscanner est l’examen de choix des lésions de la coiffe pour en déterminer le stade et l’état trophique des muscles mais nécessite une injection dans l’épaule de produit de contraste en général sous anesthésie locale pour en améliorer la tolérance.
    4. L’IRM a l’avantage de ne pas être invasive mais peut exagérer les lésions et est moins accessible que le scanner.
    5. La scintigraphie osseuse au technétium 99 donne des arguments en faveur d’un syndrome douloureux régional complexe (algoneurodystrophie) appelé ici capsulite rétractile.
  1. NOSOGRAPHIE DE L’ÉPAULE DOULOUREUSE : LES DIFFERENTES LESIONS
    1. Le conflit sous-acromial : douleur sous-acromiale due à un pincement de la coiffe supérieure sous la voûte par un bec acromial agressif occasionnant une inflammation de la bourse séreuse et de la coiffe par micro traumatismes répétés. Il s’agit d’une véritable tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule. C’est actuellement reconnu comme une maladie professionnelle dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler les TMS (troubles musculo-squelettiques).
    2. Les calcifications de la bourse séreuse sous-acromio-deltoïdienne : dans 2/3 des cas, elles sont asymptomatiques. Dans la grande majorité des cas (symptomatique ou non) elles évoluent vers une résorption spontanée. Si elles sont symptomatiques, il n’existe pas de corrélation entre la taille des calcifications et la douleur.
    3. Epaule hyperalgique aiguë pseudo-paralytique : tableau très bruyant pouvant s’accompagner de signes généraux et biologiques avec un syndrome inflammatoire. Cela ressemble à une crise de goutte. L’évolution peut se faire vers des crises itératives résolutives.
    4. Ruptures de coiffe : c’est l’évolution naturelle du conflit sous acromial négligé.
    5. Omarthrose centrée ou excentrée souvent secondaires.
    6. Arthrose acromio-claviculaire et sterno-claviculaire.
    7. Ostéonécrose aseptique de la tête humérale surtout chez le drépanocytaire mais également d’autres causes comme les maladies métaboliques, l’obésité…
    8. PPR: Pseudo Polyarthrite Rhizomélique
    9. Epaule sénile hémorragique.
  1. DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS
    1. Coronaropathie : si la douleur irradie dans le membre supérieur surtout gauche et à la mâchoire, il faut penser à une angine de poitrine voire un infarctus du myocarde
    2. Névralgie cervico-brachiale par une hernie discale cervicale
    3. Syndrome de Parsonnage-Turner : c’est une inflammation du plexus brachial.
  1. TRAITEMENT
    1. ARSENAL THÉRAPEUTIQUE
  1. Traitement médicamenteux : antalgiques, anti-inflammatoires, corticothérapie par voie générale
  2. Corticothérapie directe par voie locale : ce sont les infiltrations
  3. Trituration des calcifications
  4. La rééducation fonctionnelle avec la physiothérapie
  5. La chirurgie : acromioplastie +/- réparation de coiffe sous arthroscopie ou à ciel ouvert
  6. Ténotomie-ténodèse du long biceps
  7. Débridement arthroscopique
  8. L’arthroplastie (prothèse) standard ou inversée d’épaule
  9. Résection arthroplastique de l’acromio-claviculaire et de la sterno-claviculaire.
    1. INDICATIONS
  1. L’acromioplastie simple est indiquée dans les conflits résistants au traitement médical (repos, antalgique anti-inflammatoire, rééducation avec travail sur les abaisseurs de l’épaule, infiltration)
  2. La réparation de coiffe est proposée dans les ruptures accessibles avec muscles non dégénérés. Une acromioplastie de principe est souvent réalisée
  3. La ténotomie-ténodèse est réservée aux tendinopathies du long biceps résistant au traitement médical et aux ruptures irréparables de la coiffe exposant le tendon aux irritations acromiales
  4. L’ablation de calcification est réservée aux cas symptomatiques évoluant depuis plus d’un an et résistant au traitement médical
  5. Transferts: pour les ruptures de coiffe irréparables, des reconstructions avec lambeaux du deltoïde, du grand dorsal ou du grand pectoral ont été proposés avec des résultats mitigés. Ils sont abandonnés. Des prothèses tissulaires ont été essayées sans résultats probants
  6. Prothèse totale d’épaule: pour les situations très évoluées avec une omarthrose excentrée, la prothèse inversée qui associe une tête fixée à la glène de l’omoplate articulée avec une cupule fixée dans l’humérus permet de s’affranchir de la coiffe. La prothèse standard est réservée aux omarthroses centrées avec une coiffe intacte.

Répondre