QU’EST-CE QUE L’ALGODYSTROPHIE ?
Le but de cet article est d’informer les patients avec un langage le plus accessible possible au grand public.
Il arrive souvent dans les suites traumatiques ou opératoires en chirurgie orthopédique que des difficultés de récupération sur fond de douleurs persistantes conduisent à évoquer le diagnostic d’algodystrophie ou de « décalcification de l’os ». Ce terme barbare ajoute à l’inquiétude du patient, faute d’explications claires sur la nature de l’affection, sa durée d’évolution et l’efficacité des traitements disponibles.
C’est une affection connue depuis le 18ème siècle suite à la première description documentée réalisée par un chirurgien allemand du nom de Paul Herman Martin Sudeck.
Plusieurs terminologies sont utilisées pour désigner cette affection :
Syndrome de Sudeck, l’éponyme du chirurgien allemand
Algoneurodystrophie
Dystrophie douloureuse post traumatique
Dystrophie sympathique réflexe
Dans certaines localisations particulières : capsulite rétractile de l’épaule, syndrome épaule main
Syndrome Douloureux Régional Complexe de type I (SDRC) depuis le dernier consensus mondial sur l’affection.
Ces différentes terminologies non univoques traduisent en réalité la méconnaissance exacte de cette affection comme en témoignent les difficultés de son traitement. Voir infra.
CAUSES DE L’AFFECTION
C’est souvent un traumatisme sans qu’il existe une corrélation entre son intensité et l’importance de l’algodystrophie. Une chirurgie peut en être la cause par exemple une intervention pour un canal carpien, une arthroscopie. Parfois, un infarctus du myocarde ou une hémiplégie par un accident vasculaire cérébrale peuvent en être déclencheurs.
Mais le mécanisme de l’enchainement conduisant des causes à l’apparition de la maladie n’est pas encore clair.
MANIFESTATIONS CLINIQUES
Elles sont caractérisées en gros par deux phases : une première dite chaude de durée variable (quelques semaines à quelques mois), suivie d’une phase froide pouvant aller jusqu’à plusieurs années. La phase chaude est essentiellement marquée par des douleurs d’où le terme algo accompagnées de troubles objectifs des tissus mous d’où le terme dystrophie.
Manifestations douloureuses
Il s’agit de douleurs qui persistent au repos, parfois même la nuit, le simple effleurement du drap pouvant être insupportable. C’est ce qu’on appelle une hyperesthésie. Parfois, une stimulation non douloureuse en temps normal peut être ressentie comme douloureuse. C’est ce qu’on appelle une allodynie. Ou alors, une stimulation certes douloureuse peut occasionner une douleur disproportionnée, par exemple une simple palpation est ressentie comme un écrasement. C’est ce qu’on appelle une hyperalgésie. La douleur peut persister en excès parfois même après l’arrêt de la stimulation. C’est ce qu’on appelle une hyperpathie. Le type de douleur est qualifié par le patient en fonction de la richesse de son vocabulaire : impression de brûlure, de cuisson, de décharge électrique, de torsion, d’écrasement, de lancinance, de déchirure, de compression, de picotement, de pesanteur…
Troubles dystrophiques dans le segment de membre affecté
Dans les formes typiques, ils sont caractéristiques aux extrémités (main, poignet, pied, cheville) ou au genou. Sur la peau blanche, il existe des changements de coloration : peau rouge, pâle ou bleutée, luisance. La température locale est élevée ou bien la peau est froide. Il existe un gonflement des tissus mous. Au niveau de la main, les doigts sont boudinés en formes de petites saucisses. On peut avoir une transpiration locale anormale avec une raréfaction de la pilosité locale comparée au côté opposé.
A la phase froide
S’installe la raideur caractérisée avec au genou et à la hanche une attitude vicieuse en flexion, à la cheville une extension figée en équin. Le poignet et la main raides perdent leur fonction. Cet état, ajouté au fond douloureux peut conduite à l’exclusion du segment de membre du schéma corporel si une prise en charge n’est pas effectuée suffisamment tôt.
LES EXAMENS COMPLEMENTAIRES
La radiographie standard peut être normale au début.
A un stade avancé, la trame osseuse présente une déminéralisation mouchetée puis diffuse avec un aspect de verre dépoli.
La scintigraphie osseuse au technétium 99 est souvent demandée. Il s’agit d’un examen de médecine nucléaire au cours duquel le radio traceur technétium 99 est injecté au patient puis environ une demi-heure après, le corps allongé du patient est balayé lentement par une gamma caméra qui recueille la radioactivité émise par le corps du patient. La zone algodystrophique, à cause d’une accumulation du traceur va présenter sur l’image une hyperfixation par rapport au côté opposé.
TRAITEMENT
Comme pour toute affection dont la connaissance réelle nous échappe, l’arsenal thérapeutique est assez vaste, mais empirique, s’attaquant aux symptômes avant tout pour soulager le patient en attendant que le temps ne fasse son œuvre. On le sait très bien, même sans aucun traitement, l’algodystrophie finit par s’arranger.
Les médicaments
Une multitude de médicaments sont utilisés allant des antidouleurs des trois paliers selon l’intensité de la douleur aux antidépresseurs en passant par des molécules réputées agir sur le système nerveux végétatif. Nous n’allons pas les citer tous ici. Mais la classe médicamenteuse destinée à reminéraliser le squelette et qui aurait des effets sur la douleur a perdu depuis 2004 son indication pour l’algodystrophie : il s’agit de la fameuse calcitonine en injection sous-cutanée ainsi que les biphosphonates utilisés dans l’ostéoporose. De même les blocs à la guanéthidine sont abandonnés en France ainsi que le vasodilatateur périphérique buflomédil (Fonzylane). Certains utilisent des blocs périphériques à la ropivacaïne (Naropeine) qui a le mérite de procurer une analgésie complète pouvant durer 12 heures avec possibilité d’un cathéter pendant 48 à 72 heures. Les méthodes physiques telles que la neuromodulation électrique transcutanée ou la stimulation médullaire sont également disponibles.
Une place particulière est celle de la vitamine C à raison de 500 mg par jour. Elle est même préconisée en prévention primaire sur le terrain anxio-drepressif.
La rééducation fonctionnelle
Elle a une place particulière dans l’arsenal thérapeutique.
Elle obéit aux règles suivantes :
1. Etre infra douloureuse dans tous les cas pour ne pas entretenir la douleur
2. Etre précoce
Ses objectifs sont les suivants :
1. Lutter contre le gonflement en favorisant le retour veineux et lymphatique par des postures, des massages, de la presso thérapie par manchons et des contractions musculaires
2. Lutter contre les accolements tissulaires source de raideur par des mobilisations
3. Entretenir la fonction du membre afin d’éviter son éventuelle exclusion du schéma corporel.
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