Selon Pierre Johnson, consultant en biodiversité et éthique « La bio piraterie c’est l’exploitation abusive de la biodiversité locale et des savoirs traditionnels qui lui sont associés ».
A l’heure où des « négociations » sur l’exploitation effrénée du vivant se tiennent en Inde, le cas du mamba noir est démonstratif à plus d’un titre. De quoi s’agit-il ?
Nous avons souvenir de ces puissants serpents à la morsure mortelle quand nous étions encore enfant au village en Afrique. Nous en citons trois : dzakpata, glé, abredzima (ce dernier semble correspondre sauf erreur de notre part au black mamba selon la description que nous en connaissons). Les victimes des morsures vues à temps étaient soignées par saignées avec des spécialistes qui incisaient le point de morsure et pratiquaient des succions. On utilisait beaucoup des échalotes et des oignons. Ont-ils un effet antagoniste sur des composants du venin ? Les victimes avaient d’après nos souvenirs des engourdissements voire des anesthésies du membre mordu. C’est sur ces dernières manifestations que nous souhaitons attirer l’attention dans cet article.
Il y a quelques jours, la perspective de la mise au point d’un anti douleur plus puissant que la morphine a été annoncée par une équipe du CNRS à l’Université de Nice. Il s’agit d’une substance extraite du venin de Dendroaspis polylepis alias le mamba noir (à cause de sa muqueuse buccale noire), un des plus venimeux serpents, le plus rapide, le plus agile, jusqu’à plus de 4 mètres de long. Cette substance baptisée mambalgine serait déjà brevetée. Elle est réputée plus puissante que la morphine sans les effets indésirables des opiacés que sont les vomissements, la dépression respiratoire, l’accoutumance et l’échappement au cours des essais effectués sur des souris en laboratoire. Ce brevetage correspond à la définition ci-dessus donnée du pillage de la biodiversité. Nous savons qu’il existe des savoirs ancestraux au sujet de ces reptiles dont la tête, réservoir du puissant venin, peut être torréfiée ou séchée et utilisée comme poudre médicamenteuse. L’interrogation à laquelle nous invitons c’est au nom de quels valeurs et principes des firmes brevètent ce qui relève du patrimoine commun du genre humain ? Pire, 97% des brevets sont au nord et 90% de la diversité biologique au sud. Pour illustration voici l’habitat du mamba noir dans les savanes africaines à l’exception de nulle autre part : Sénégal, Guinée, Guinée-Bissau, Mali, Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Éthiopie, Érythrée, Somalie, Kenya, Ouganda, Tanzanie, Gabon, Congo-Kinshasa, Angola, Zambie, Namibie, Botswana, Zimbabwe, Malawi, Mozambique, Swaziland, Afrique du Sud.
Il est regrettable qu’au seuil de l’entrée de l’humanité au pallier IV des antalgiques grâce au mamba noir et après le pallier III procuré par une plante, le pavot, la notion de patrimoine commun ne soit pas plus mise en avant. La boulimie du fric est notre ennemi à tous.
D’autres substances qualifiées de neurotoxiques, d’hémotoxiques et cardiotoxiques laissent la voie à la recherche sur des médicaments en neurologie, les facteurs de coagulation du sang en hématologie, et en cardiologie respectivement.
D’autres substances utilisées dans les empoissonnements criminels sont également des voies de recherche comme le dard de certains insectes, la bile de certains sauriens…
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